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Négociations capitulardes sur la loi travail.

Publié le par UC-Lyon

Le 6 avril, la direction du syndicat étudiant UNEF -dont nous épinglons régulièrement la proximité avec le pouvoir - a participé à une séance de négociation avec les membres du gouvernement. En l'espèce, nous notons la présence de la ministre de l’Education nationale Najat Vallaud-Belkacem, de la ministre du Travail Myriam El Khomri et du ministre de la Jeunesse Patrick Kanner. 

 


Après la mobilisation, couronnée de succès, du 5 Avril, cette rencontre avait pour objet, d'après l'interview réalisée auprès du Figaro - Etudiant, de "permettre d’avoir un vrai débat sur les jeunes et leur insertion sur le marché du travail", mais également de " défendre la stabilité de l’emploi, l’amélioration des droits sociaux, le développement de la formation professionnelle et la lutte contre les discriminations au travail."

Laissons de coté le caractère toujours aussi corporatiste du discours de ce syndicat, et arrivons là où les voeux pieux s'effacent, et où il ne reste que la triste réalité.

 

Négocier, c'est l'art de dire "ce qui est à moi est à moi, ce qui est à toi est négociable."

 

Les aspects mentionnés par le président de l'UNEF sont problématiques. Ce sont des mots vides de sens, et derrière lesquels il est possible de coller n'importe quelle réalité. Le gouvernement PS / EELV / PRG prétend également aux mêmes ambitions, et mentionne dans ses communications que la loi travail sera un grand pas en avant dans la création de l'emploi, dans l'intégration des jeunes dans l'économie, et d'autres objectifs tout à fait louables, mais dans lesquels il est possible de discerner, avec une gêne certaine, un écart entre les moyens et les fins attendues. 

Qu'est ce qui pourrait être négocié dans cette loi ? Sur quel point pourrait-on parvenir à concéder quelque chose, et trouver un moyen terme acceptable ?

C'est là que se cache le grand problème. L'aspect principal de cette loi étant la subordination du code du travail et des conventions collectives aux accords internes à l'entreprise, toutes les promesses d'aménagement perdent leur sens.

Pourquoi ? Car c'est un blanc seing laissé entre les mains du patronat. Quels que soient les aménagements gagnés par la courageuse négociation menée par l'UNEF et ses consorts, ceux-ci demeureront subordonnés aux intérêts de la bourgeoisie. Ces aménagements pourraient aussi bien être gravés dans le marbre, ils n'en seront pas moins balayés par le premier accord d'entreprise venu.

C'est pour cela que les organisations conséquentes exigent le retrait complet de la loi, et non des amendements, car cette question est le coeur même de la loi.

 

Stupidité ou sabotage ? 

 

La frontière entre la bêtise et le sabotage est parfois mince. Elle est même parfois extrèmement ténue. Mais nous faisons le choix de considérer que les dirigeants de l'UNEF ne sont pas des gens stupides, qu'ils ont pris le temps d'étudier la loi, et qu'ils ont porté une oreille attentive aux échos des analyses produites par d'autres.

Si ce n'est pas de la bétise, c'est plus grave.

C'est donc que l'UNEF et ses dirigeants ont une autre idée derrière la tête. 

Nous avions écrit, il y a peu, sur notre rejet intégral de la présence du MJS et de l'UNEF dans les mouvements sociaux. Nous analysons leur présence comme celle d'agents doubles et de traîtres en puissance, dont la tâche est de permettre aux positons des fractions du PS opposées à la ligne de l'Elysée d'être présentes dans les luttes, et de permettre à leur agence de placement, menacée d'explosion, de survivre.

C'est bien là, toujours, notre analyse. L'UNEF a permis au PS de pouvoir être présent dans la rue et à l'Elysée, d'être dans l'opposition et au pouvoir, bref de jouer sur les deux tableaux. Cette méthode opportuniste est une constante dans les organisations de ce type, où les frondeurs sont légion, et où des opposants à la loi travail, comme Filoche, sont des dirigeants haut placés. 

 

Cette négociation, c'est celle d'une fraction du PS qui négocie avec une autre.

 

Nous ne doutons pas que l'UNEF pourra trouver un terrain d'entente avec ses confrères. Lorsque cela sera obtenu, il ne fait pas l'ombre d'un doute que la fin de la récréation sera, pour eux, sifflée, et qu'ils tenteront par tous moyens de saboter toute poursuite du mouvement. 

 

Les néophytes du travail.

 

Après les négociateurs, un point est à faire sur leurs interlocuteurs. 

 

 

Patrick Kanner: Maitre de conférence associé à l'université de Lille III. N'a jamais travaillé dans une entreprise. 

 

Myriam El Khomri: Avant d'être ministre du travail, est élue dans le 18ème arrondissement de Paris et travaille depuis sa fin d'étude dans diverses tâches au sein de cette ville. N'a jamais travaillé en entreprise. 

 

Najat Vallaud-Belkacem: A été juriste dans un cabinet d'avocat parisien au conseil d'Etat et à la cour de Cassation, pendant 3 ans avant de faire carrière dans la politique. N'a pas non plus les mains trop calleuses.

Ces interlocuteurs, qui, sur l'autel des exigences du MEDEF, sacrifient le droit du travail, n'ont jamais été concernés par celui-ci. Leurs expériences leurs ont été fournies par leurs réseaux, par leurs cliques. Tout comme celles des anciens dirigeants de l'UNEF. Pour mémoire, Bruno Julliard, président de l'UNEF durant le CPE, a ainsi bénéficié d'une agréable promotion en tant qu'adjoint de Bertrand Delanöe à la mairie de Paris. D'autres dirigeants, lyonnais eux aussi, ont ainsi pu trouver de sympathiques sinécures dans les mairies PS du grand Lyon. 

Il est intéressant de voir que dans cette négociation, aucun des acteurs n'a jamais travaillé de manière honnête et productive. Ces individus n'ont jamais été confrontés à l'exploitation. Pour eux, elle est un mythe, une légende, quelque chose qui leur est totalement étranger. 

Pour eux, le chômage n'est qu'un chiffre, pas un vécu. Les licenciements sont une statistique, pas un drame. La pénibilité du travail, c'est un caprice de la part des ouvriers. 

Ces gens ne sont pas de notre bord, ni de notre monde. 

 

Le sort des travailleurs est entre les mains des travailleurs. 

 

Ce ne sont pas ces négociations de salon qui vont améliorer le sort des travailleurs. Seule une organisation bénéficiant d'une véritable indépendance de classe peut les représenter. Les cadeaux de la bourgeoisie, les subventions, les "balles sucrées" comme l'écrivait Mao-Zedong, ne servent qu'à inféoder les organisations aux désirs des bourgeois, à les modérer.

Cette organisation à construire, ce parti de la classe ouvrière, indépendant de l'Etat, indépendant de la bourgeoisie, est une étape essentielle pour chasser du pouvoir les ennemis du peuple que sont les capitalistes.

Cependant, la lutte ne doit pas pour autant attendre, et la lutte stratégique contre la loi El Khomri doit se poursuivre, s'intensifier, se structurer jusqu'au retrait complet de ce texte scélérat et criminel. 

 

Négocier, c'est capituler !

 

 

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